dimanche, octobre 28, 2007

Soutine le dimanche.

La critique de Philippe Dagen dans le journal "Le Monde" m'avait averti...Je savais les petites salles sans recul, l'obscurité, l'absence d'ouverture, la sensation d'être dans un sous sol.... oui mais monsieur Dagen n'y était pas venu le dimanche!!! Il aurait rajouté l'impossible circulation, les vingt personnes entre chaque tableau et vous...
J'ai bien eu envie de rebrousser chemin . On avait beaucoup critiqué le musée du Luxembourg d'une époque..mais ce n'était rien à coté.!!

Oui mais voilà, l'oeuvre de Soutine était là!! Et cela m'avait couté 9 Euros !!

De la couleur forte étalée et mélangée en pâte grasse. L'héritage des fauves et des expressionistes . Des sujets somme toute classiques : paysages, natures mortes, portraits... Et pourtant ,tres vite, une sensation de différences'impose. Un vertige.
le déséquilibre apparent , la matière en mouvement qui précède le sujet , les regards. La magnifique période de Céret. la saturation de matière ,de couleurs... Et , régulièrement, un tableau plus classique, plus calme comme un effort de maitriser la matière indomptable,un effort de maitriser son âme . Comment ne pas être frappé par ces deux quartiers de viande dont l'un respire le fauvisme et l'autre une etude classique qui prend presque le relief du réel.... trois études de poulets écorchés, pendus à un mur de brique : deux s'approchent du réel, bien qu'enlevés et de couleurs vives...celui du centre n'est que taches, frôle l'abstraction et n'en prend que plus de force.
Dans la nature , Soutine a été séduit par les arbres. Ce sont leur troncs, leurs branches qui donnent le rytme des tableaux.L'arbre peint par Soutine est vie, lutte pour survivre, énergie; Il envahit la toile et en devient l'esprit. On a dit de Soutine qu'il préfigurait l'expressionnisme abstrait..;Je comprends cela. Plus que le sujet c'est la gestuelle du peintre qui est énergie vitale.
L'apparence des choses disparait derrière l'énergie pulsionelle de la nature.
C'est presqu'encore de paysages qu'il s'agit quand soutine peint un portrait .C'est toujours de cette énergie, de cette sève qu'il s'agit...et sans doute aussi de la perception que la chair n'est que de passage et appelée à disparaitre. Je vois Soutine et je pense à Bacon, à lucian freud...Pourtant rien de douloureux ,de morbide. Avec la force de la peinture, de la couleur, c'est bien la vie qui se manifeste. Et dans les portraits d'enfant c'est l'émotion qui affleure...

Une oeuvre singulière , unique, le reflet d'une vie également singulière...mais que je ne vous relaterais pas .Il y a suffisemment de littérature sur le sujet.
A la Pinacothèque de Paris, place de la Madeleine...jusqu'au 27/01/08. Occasion rare. Il n'y a plus eu d'exposition sur ce peintre depuis des décennies.
Evitez le Dimanche apres midi si vous le pouvez, mais n'évitez pas l'expo de Soutine. Cest vraiment une rencontre vraiment particulière qui vous attend.

samedi, octobre 27, 2007

Dixlesic

.
" les mots déboulent dans ma bouche à une vitesse incroyable. Puis je ralentis et je me glisse avec délectation dans la peau de mes drôles d'amis...comme autant de dyslexiques de la vie.Ils peuvent s'exprimer au croisement des mots et du jeu...."
Lauréline Kuntz. Championne de France de slam.
Ses mots coulent, nous frappent, nous amusent, nous troublent . Des mots de la vie, parfois crus, jamais vulgaires .Lauréline Kuntz parle des gens , parle aux gens ,parle d'amour avec audace et intelligence .
Talentueuse;
Une occasion de découvrir cette poésie actuelle qu'est le slam. Avec la multiplication des images...on avait oublié les mots, leur force, leur rythme. Susciter les images plutôt que les montrer. Etablir des échos au coeur des gens .
Redécouvrir que les mots sont au coeur de la vie , de nos échanges, de nos pensées et au profond de notre inconscient .

Et pouvait il y avoir pour cette amoureuse du langage un autre lieu que ....Le Point-Virgule ?

Giacometti

Quelques douze ,treize ans apres le musée d'art moderne, le musée Georges Pompidou nous propose de rencontrer l'oeuvre de Alberto Giacometti (1901-1966).Une exposition autour de l'atelier de l'artiste .Un atelier lieu de vie lieu de travail ( il y vivra de 26 à sa mort ) dont la présentation écrite de musée dit: "il est devenu son univers et peu à peu une extension de son être ".
Cette magnifique exposition, claire, de circulation agréable, commence avec les portraits d'Alberto par son père, peintre impressionniste , ou bien par son parrain le peintre Cuno Amiet. Comment ne pas s'interresser à la peinture avec une telle hérédité ? Alors le jeune Alberto va s'y essayer et le parcours proposé nous porte de ses premières oeuvres :tête de Diego, son frère, tête de son père, de sa mère jusqu'à ses plâtres peints de 45 à 65. Une vie de recherche incessante à travers le dessin, la peinture, la sculpture , une vie dont témoignent ses oeuvres,mais aussi des dizaines de clichés réalisés par Brassaï, Doisneau , Cartier -Bresson.... qui nous le montrent dans son atelier. Des photos superbes!!
Un extrait vidéo nous permet de le voir peindre un portait. Moment extraordinaire et émouvant . Ce regard qui passe sans arrêt du dessin au modèle, la main qui cherche à poser ,de la pointe fine du pinceau, les lignes de cet espace entre les deux yeux, la naissance du nez et qui sera toujours pour lui un espace de question. Dans cet atelier tous les jours et pendant 4à5 ans parfois , sont venus poser des modèles ( modèles mais aussi son frère Diego, sa femme Annette , ses amis ) devant cet artiste singulier qui déclarait qu'il aurait pu travailler toute sa vie avec le même modèle .
Ce même artiste qui disait aussi, alors que les expositions le consacraient déja , qu'il n'en était qu'au début parce qu'il n'arrivait à rien. Aucune forfanterie chez cet homme, juste le sens du travail sans relache et la perception de l'impossible satisfaction .
C'est l'histoire d' un homme, autant que le parcours d'un artiste que nous offre Beaubourg.
Une oeuvre ou l'angoisse de mort se partage avec une façon unique de fouiller la vie.
Un homme qui a marqué tous ceux qui l'ont rencontré . Une des grandes oeuvres du XXeme qui nous interpelle encore.

Pour ma part je garde une image pariculière en mémoire. Dans un des films publiés par Arte :" Un homme parmi les autres " de JM Drot, on voit quelques images de l'inauguration d'une des expositions. Parmi la foule qui se presse autour des oeuvres, qui bavarde , qui boit....une sculpure nous regarde et petit à petit le regard de cette oeuvre s'anime...et j'ai éprouvé cette forte impression : c'est elle qui était vivante et le public décor futile et inconsistant....
Vous l'aurez compris, ce grand artiste me touche infiniment .